Quand le photovoltaïque ne sera-t-il pas compté comme une consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers au sens du ZAN ?

En urbanisme, le zéro artificialisation nette (ZAN), au fil des lois et des décrets successifs, a fini par avoir un cadre juridique que l’on suppose enfin stabilisé…

Voir : Ressources (dont des VIDEOS) sur le ZAN 

La loi climat / résilience n° 2021-1104  fixe ainsi en son article 191 un objectif national d’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050 et pour l’atteindre, un objectif de réduction du rythme de l’artificialisation par tranches de dix années, à inscrire et à décliner dans les documents de planification régionaux et les documents d’urbanisme, traduit, pour la première décennie, par un objectif de réduction de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (NAF), notion définie au III, 6° de l’article 194 de la loi.

Mais un principe dérogatoire au calcul de la consommation d’espaces NAF a été introduit pour les installations photovoltaïques implantées sur les espaces agricoles ou naturels.

Ainsi, le 6° du III de cet article 194 prévoit, pour la première tranche de dix ans, les conditions dans lesquelles un espace naturel ou agricole occupé par une installation de production d’énergie photovoltaïque au sol n’est pas comptabilisé dans la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, en précisant :

  • d’une part, que l’installation ne doit pas affecter durablement les fonctions écologiques du sol ainsi que son potentiel agronomique,
  • d’autre part, qu’elle ne doit pas être incompatible avec l’exercice d’une activité agricole ou pastorale sur le terrain sur lequel elle est implantée, si la vocation de celui-ci est agricole.

C’est dans ce cadre qu’ont été publiés :

  • le décret n° 2023-1408 du 29 décembre 2023 définissant les modalités de prise en compte des installations de production d’énergie photovoltaïque au sol dans le calcul de la consommation d’espace au titre du 6° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (NOR : TREL2211876D), que voici :

Aux termes de ce décret, un espace naturel ou agricole occupé par une installation de production d’énergie photovoltaïque n’est pas comptabilisé dans la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers si les modalités de cette installation permettent de garantir :

1° La réversibilité de l’installation ;
2° Le maintien, au droit de l’installation, du couvert végétal correspondant à la nature du sol et, le cas échéant, des habitats naturels préexistants sur le site d’implantation, sur toute la durée de l’exploitation, ainsi que de la perméabilité du sol au niveau des voies d’accès ;
3° Sur les espaces à vocation agricole, le maintien d’une activité agricole ou pastorale significative sur le terrain sur lequel elle est implantée, en tenant compte de l’impact du projet sur les activités qui y sont effectivement exercées ou, en l’absence d’activité agricole ou pastorale effective, qui auraient vocation à s’y développer.

Mais c’est surtout l’arrêté qui détermine précisément les caractéristiques techniques auxquelles doivent satisfaire les installations de production d’énergie photovoltaïque pour ne pas être comptabilisées comme consommant de l’espace naturel, agricole ou forestier, avec pour l’essentiel le tableau que voici :

Caractéristiques techniques des installations
de production d’énergie photovoltaïque
Valeurs ou seuils d’exemption du calcul de la consommation
d’espaces naturels, agricoles et forestiers
Hauteur des panneaux photovoltaïques1,10 mètre minimum au point bas
Densité et taux de recouvrement du sol par les panneaux photovoltaïquesEspacement entre deux rangées de panneaux photovoltaïques distinctes au moins égal à deux mètres. Les deux mètres sont mesurés du bord des panneaux d’une rangée au bord des panneaux de la rangée suivante et non pas d’un pieux d’ancrage à l’autre.
Type d’ancrages au solPieux en bois ou en métal, sans exclure la possibilité de scellements « béton » < 1 m2, sur des espaces très localisés et justifiée par les caractéristiques géotechniques du sol ou des conditions climatiques extrêmes.
Pour les installations de type trackers, la surface du socle béton ne doit pas dépasser 0,3 m2/ kWc
Type de clôtures autour de l’installationGrillages non occultant ou clôtures à claire-voie, sans base linéaire maçonnée
Voies d’accès aux panneaux internes à l’installation et aux autres plateformes techniquesAbsence de revêtement ou mise en place d’un revêtement drainant ou perméable

Ces règles s’appliquent sans préjudice des dispositions des articles L. 111-27 et L. 111-29 du code de l’urbanisme relatives à l’autorisation des projets situés sur des surfaces agricoles.

NB : voir aussi ici pour les cas où le photovoltaïque sera, ou ne sera pas, réputé, selon un seuil, réponse à des « raisons impératives d’intérêt public majeur » au regard des règles propres aux espèces protégées. 

Cet arrêté définit également les modalités de la mise à disposition et de l’enregistrement de ces données et informations, par les porteurs de projets d’installations de production d’énergie photovoltaïque, pour tout projet d’implantation situé sur un espace à vocation agricole ou naturelle. Voir l’article 2 de cet arrêté, ainsi rédigé :

« Le ministre en charge de l’énergie met en place une plateforme numérique aux fins de rassembler l’ensemble des données et informations relatives aux caractéristiques techniques et critères d’implantation des installations mentionnées à l’article 1er du présent arrêté.
Cette plateforme peut être consultée par l’autorité compétente en charge de l’élaboration des documents de planification et d’urbanisme pour obtenir les informations nécessaires à la décision de ne pas comptabiliser dans la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers l’espace occupé par le projet d’installation, en application du 6° du III de l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 susvisée

… et voir l’article 3 pour ce qui est des procédures à suivre pour les porteurs de projets.

N.B. : le décret prévoit des mesures transitoires pour les installations de production d’énergie photovoltaïque dont la date d’installation effective ou la date de dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme est comprise entre la promulgation de la loi climat / résilience n° 2021-1104 du 22 août 2021 et la publication dudit décret.