Quand s’efface le droit minier, reste le droit des déchets

Une fois accompli l’accomplissement des formalités liées à la procédure d’arrêt des travaux miniers, cesse l’exercice de la police spéciale des mines à quelques exceptions près.

Mais alors il est, si les conditions en sont réunies, loisible à l’autorité administrative d’intervenir au titre de la police spéciale des déchets sur un site minier et, a fortiori, sur le site d’une ancienne exploitation minière qui n’est plus soumis à la police spéciale des mines.

Dès lors qu’il résulte par ailleurs des dispositions de l’article L. 541-2 du code de l’environnement que le producteur ou le détenteur de déchets reste responsable de la gestion de ces déchets jusqu’à leur élimination ou leur valorisation finale, rien ne s’oppose donc, selon la CAA de Toulouse, à ce que l’autorité compétente intervienne sur le fondement des pouvoirs qui lui sont reconnus par l’article L. 541-3 dudit code à l’encontre du producteur ou du détenteur de déchets situés sur un tel site, alors même qu’il s’agirait de l’exploitant ou de l’ancien exploitant.

Sources : voir aussi CE, 18 novembre 1998, Jaeger, n° 1612, B ; CE, 11 janvier 2007, Ministre de l’écologie et du développement durable c/ Société Barbazanges Tri Ouest, n° 287674, B.

En l’espèce, la cour administrative d’appel de Toulouse juge donc que le préfet a pu légalement mettre en demeure l’ancien exploitant de gérer les résidus miniers conformément à la règlementation des déchets.

Des activités minières portant sur l’extraction de métaux lourds avaient en effet été exercées à partir du 19ème siècle et jusqu’aux années 1970 sur le territoire des communes de Saint-Félix-de-Pallières, Thoiras et Tornac (Gard).

Après que l’Etat et la société exploitant ces mines ont mené à terme, au début des années 2000, la procédure d’arrêt des travaux prévue par le code minier, plusieurs études réalisées entre 2008 et 2016 ont mis en évidence des concentrations importantes de métaux lourds sur certains sites de ces anciennes mines.

Dans ce contexte, après avoir identifié les principaux résidus miniers à l’origine de cette pollution, le préfet du Gard a invité les maires des communes concernées à mettre en œuvre les pouvoirs que leur attribue le code de l’environnement en matière de déchets pour obliger l’ancien exploitant à assurer une gestion de ces résidus conforme à la législation.

En l’absence de réponse des maires, le préfet du Gard a pris en 2018 une série d’arrêtés par lesquels il s’est substitué aux maires pour mettre en demeure l’ancien exploitant de respecter la législation relative aux déchets pour le traitement de ces résidus.

Les communes intéressées et l’ancien exploitant ont contesté ces arrêtés préfectoraux devant le tribunal administratif de Nîmes. Par neuf jugements rendus le 21 décembre 2020, ce tribunal avait prononcé l’annulation de ces arrêtés après avoir relevé que l’État ne pouvait plus intervenir à l’encontre de l’ancien exploitant depuis l’achèvement de la procédure d’arrêt des travaux.

Saisie de neuf recours contre ces jugements par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, la cour administrative d’appel de Toulouse a, par neuf arrêts rendus le 16 mars 2023, infirmé la position retenue par tribunal administratif de Nîmes.

La cour a notamment considéré qu’aucun texte ni aucun principe ne faisait obstacle à ce que l’administration compétente pour la police des déchets agisse à l’égard de l’ancien exploitant, producteur des résidus miniers à l’origine de la pollution constatée, pour faire respecter les obligations qui sont imposées par le code de l’environnement à tout producteur de déchets quelle qu’en soit la nature. En conséquence, la cour a confirmé la légalité des arrêtés de mise en demeure pris par le préfet du Gard en 2018.

Source :

Cour Administrative d’Appel de Toulouse, 16 mars 2023, n° 21TL00688