Pollution atmosphérique et infraction pénale : faute d’avoir elles-mêmes un poumon, c’est en vain que les associations environnementales s’époumonent

Recours des associations environnementales agréées : pas d’ouverture aux cas de mise en danger d’autrui, même en cas de pollution atmosphérique, tranche la Cour de cassation dans deux importantes décisions. Au pénal, nous sortons des domaines où ces associations peuvent agir. Et au titre de la constitution de partie civile, les personnes morales que sont ces associations ne sont pas assez directement les victimes pour agir. Ces associations auront beau s’époumoner, ce ne sont pas leurs poumons associatifs qui sont pollués… 

I. Une multiplicité de recours possibles, notamment devant le juge administratif. Des recours plus complexes au pénal.

L’Etat a, en juillet, été lourdement condamné par le Conseil d’Etat en matière de pollution atmosphérique (non sans débats sur le sort final de ladite somme). Voir :

… et le jeu des compétences de chacun en ce domaine s’avère d’une assez grande complexité. Voir :

En termes de recours, on pense donc surtout aux recours en annulation de décisions, aux recours en carence (l’Etat français étant fautif au regard du droit européen) et même, désormais, aux cas de responsabilité indemnitaire devant le juge administratif, pour lesquels d’ailleurs le juge exige un préjudice direct et certain, ce qui est logique mais fragilise la plupart des recours. Voir :

Mais à côté de ces recours, usuels pour le juriste publiciste, se pose la question des recours possibles, indemnitaires ou carrément au pénal, devant le juge judiciaire.

Mais la pollution de l’air ne donne pas lieu à une infraction claire et nette, aussi redoutable que ce qui s’applique en matière, de pollution des eaux (domaine où plusieurs infractions coexistent, dont le célébrissime et très redouté article L. 432-2 du Code de l’environnement).

Mais rares seront les cas où on aura de manière claire une victime pouvant engager elle-même un recours et pouvant démontrer, par exemple, qu’elle subit des blessures par négligence (sauf dans des cas extrêmes : cas de personnes fragiles touchées après l’accident Lubrizol par exemple…).

D’où à défaut l’idée d’user du délit de mise en danger délibérée de la vie d’autrui. Des associations environnementales agréées se sont engouffrées dans cette brèche. A tort.

II. Mais les associations environnementales agréées ne peuvent agir, ni au pénal, ni via une constitution de partie civile, pour lutter contre la pollution atmosphérique, même via la fausse bonne idée consistant à brandir la mise en danger délibérée de la vie d’autrui

Cette porte, voie d’accès aux recours devant le juge répressif, des associations agréées ayant pour objet la protection de la nature et de l’environnement ont cru pouvoir l’ouvrir via le délit de mise en danger de la vie d’autrui. L’intérêt de cette infraction étant d’être constituée sans avoir à brandir une victime…

Une porte que la Cour de cassation, par deux décisions du 8 septembre 2020, vient de fermer. Ou plutôt ces portes. Car ce sont bien deux leçons différentes qui ont été administrées avec fermeté en réponse au zèle quérulent de ces associations.

Certes ces associations agréées peuvent-elles saisir un juge d’instruction pour que celui-ci enquête sur des délits portant atteinte à ce patrimoine naturel.

Le code de l’environnement les y autorise pour certains types d’infractions, comme celles tendant à la protection de l’eau, de l’air, des sites et paysages ou au respect des règles d’urbanisme, de sûreté nucléaire, etc.

Mais, confirme la Cour de cassation, cette liste doit être considérée comme limitative.

Or, le délit de mise en danger d’autrui n’y figure pas. Même agréée, une association qui se plaint de carences dans la lutte contre l’exposition de la population aux polluants atmosphériques, ne peut donc saisir un juge d’instruction de ce délit en se prévalant du code de l’environnement.

L’article L.142-2 du code de l’environnement qui permet aux associations agréées pour la défense de l’environnement de se constituer partie civile, texte spécial d’interprétation stricte, ne s’applique qu’à la condition que l’infraction dénoncée relève de la liste limitative des infractions aux dispositions législatives relatives à la protection de l’environnement ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions ou les nuisances énumérées par cet article.
Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui retient qu’une association ne peut, sur le fondement de l’article L.142-2 du code de l’environnement qui a pour objet de protéger le cadre de vie, la nature et l’environnement, se constituer partie civile pour le délit de mise en danger d’autrui, qui s’attache à la protection des êtres humains (premier moyen).

Avis personnel : d’autres infractions eussent sans doute pu être soulevées en matière de pollution…

Autre apport de la Cour de cassation : l’association n’est pas non plus recevable à agir sur le fondement du code de procédure pénale : ce code en réserve, en effet,  le droit à ceux qui souffrent d’un dommage directement causé par l’infraction. Or l’infraction de mise en danger d’autrui ne concerne pas les personnes morales (sociétés, associations, etc.), mais seulement les personnes physiques. 

Ne démontre en effet pas un préjudice personnel directement causé par le délit dénoncé de mise en danger d’autrui une association, personne morale qui, par essence, ne peut exciper d’une exposition au risque d’atteinte à l’intégrité physique

Sources :

Cass. Crim., 8 septembre, pourvoi n° 19-84.995

Cass. crim., 8 septembre, pourvoi n° 19-85.004

À rapprocher de Crim., 21 avril 2020, pourvoi n° 18-86.652

Voici ces deux arrêts

Arrêt n°1501 du 8 septembre 2020 (19-84.995) – Cour de cassation – Chambre criminelle
-ECLI:FR:CCAS:2020:CR01501

Rejet

Sommaire
1°. La plainte préalable à la constitution de partie civile doit avoir été déposé personnellement par la partie civile et ne peut bénéficier à une personne qui n’a pas suivi le circuit imposé par l’article 85 alinéa 2 du code de procédure pénale (1er moyen).

2° Une association, qui n’est pas recevable à se constituer partie civile sur le fondement de l’article L142-2 du code de l’environnement en l’absence de renouvellement de son agrément, peut toujours, en application de l’article 2 du code de procédure pénale, se constituer partie civile dès lors qu’elle démontre un préjudice personnel directement causé par le délit.
Ne démontre pas un préjudice personnel directement causé par le délit dénoncé de mise en danger d’autrui une association, personne morale qui, par essence, ne peut exciper d’une exposition au risque d’atteinte à l’intégrité physique (3éme moyen).

Demandeur(s) : association Écologie sans frontière ; et autre 

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. L’association Écologie sans frontière a, le 11 mars 2014, déposé une plainte simple au parquet de Paris, du chef de mise en danger d’autrui en raison de la pollution atmosphérique, qui a été classée sans suite le 4 mai 2015.

3. Le 8 juillet 2015, les associations Écologie sans frontière et Générations futures ont déposé plainte et se sont constituées parties civiles devant le doyen des juges d’instruction de Paris des chefs de mise en danger d’autrui en raison de cette pollution.

4. Par ordonnance du 5 juillet 2018, le juge d’instruction a constaté l’irrecevabilité des constitutions de parties civiles desdites associations.

5. Les associations ont relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

6. Il n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de l’association Générations futures, alors « qu’aucun formalisme tant sur la forme que sur le contenu de la plainte simple n’est exigée à peine d’irrecevabilité de la plainte avec constitution de partie civile, si ce n’est qu’elle doit seulement révéler les faits susceptibles de causer au plaignant ou à un tiers un préjudice ; qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la plainte avec constitution de partie civile de l’association Générations futures, qu’il résulte de la lecture combinée des alinéas 1 et 2 de l’article 85 du code de procédure pénale que le bénéfice de la recevabilité de la plainte avec constitution de partie civile doit être propre au plaignant, auteur de la simple plainte, de sorte que la plainte ne saurait bénéficier « par ricochet » à une personne qui n’aurait pas elle-même suivi le circuit imposé par l’article 85 alinéa 2 du code de procédure pénale, lorsqu’il est seulement exigé de cet article l’existence d’une plainte déposée devant le procureur de la République ou un service de police judiciaire, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 85, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

8. Pour confirmer l’ordonnance du juge d’instruction et dire irrecevable la plainte avec constitution de partie civile de l’association Générations futures, l’arrêt attaqué énonce qu’il résulte de la lecture combinée des alinéas 1 et 2 de l’article 85 du code de procédure pénale que le bénéfice de la plainte avec constitution de partie civile, accordé en raison d’un dépôt préalable d’une plainte simple pour les mêmes faits, est propre au plaignant auteur de la plainte simple, et ne saurait bénéficier « par ricochet » à une personne qui n’aurait pas elle-même suivi le circuit imposé par l’article 85 alinéa 2 du code de procédure pénale.

9. Les juges ajoutent qu’il est constant que l’association n’a pas déposé de plainte simple préalable pour les faits pour lesquels elle s’est constituée partie civile le 8 juillet 2015.

10. En l’état de ces énonciations la chambre de l’instruction a fait l’exacte application des textes visés au moyen.

11. Ainsi, le moyen doit être écarté.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de l’association Écologie sans frontière du chef de mise en danger d’autrui, alors :

« 1°/ qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l’association Écologie sans frontière du chef de mise en danger d’autrui, qu’elle s’était vue refuser le renouvellement de son agrément à compter du 31 décembre 2013, lorsque l’association n’a à justifier que d’une atteinte aux intérêts collectifs qu’elle défend, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 142-2 du code de l’environnement, 85, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ qu’en dehors de toute habilitation légale, une association est recevable à se constituer partie civile dès lors qu’elle est susceptible de subir un préjudice personnel directement causé par l’infraction ; qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l’association Écologie sans frontière, que, par essence, une personne morale ne peut exciper une exposition au risque d’atteinte à l’intégrité physique, lorsque le délit de mise en danger d’autrui ne limite pas la faculté de se constituer partie civile aux seules personnes physiques, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 223-1 du code pénal, 2, 85, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

3°/ qu’une association est recevable, en tout état de cause, à se constituer partie civile dès lors que l’infraction est susceptible de porte atteinte aux intérêts collectifs que celle-ci a pour mission de défendre conformément à son objet ; que l’association Écologie sans frontière qui, selon ses statuts, a pour objet l’amélioration de la qualité de vie dans un cadre de développement durable et la lutte contre toutes formes de pollutions et nuisances ayant un impact sur la santé humaine, est susceptible de subir un préjudice direct et personnel découlant du délit de mise en danger d’autrui ; qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l’association Écologie sans frontière du chef de délit de mise en danger d’autrui, que cette association ne pouvait se prévaloir d’un préjudice personnel, lorsque ce délit, en ce qu’il vise la protection de la vie ou de l’intégrité d’autrui, est susceptible de porter atteinte aux intérêts collectifs que l’association défend, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 223-1 du code pénal, 2, 85, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

13. Pour confirmer l’ordonnance du juge d’instruction et dire irrecevable la plainte avec constitution de partie civile de l’association Écologie sans frontière du chef de mise en danger d’autrui en raison de la pollution atmosphérique, l’arrêt attaqué énonce, d’une part, que ladite association n’était pas recevable sur le fondement de l’article L. 142-2 du code de l’environnement à se constituer partie civile, le renouvellement d’agrément lui ayant été refusé.

14. L’arrêt relève, d’autre part, que sur le fondement du droit commun, l’action civile devant les juridictions répressives est un droit exceptionnel qui, en raison, de sa nature, doit être strictement renfermé dans les limites des articles 2 et 3 du code de procédure pénale et qu’en application du premier de ces deux articles, l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction appartient uniquement à ceux qui ont personnellement souffert du dommage causé par l’infraction.

15. Les juges retiennent ensuite qu’alors que le délit dénoncé de mise en danger d’autrui se définit comme le fait d’exposer autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, une association personne morale ne peut, par essence, exciper d’une telle exposition au risque d’atteinte à l’intégrité physique.

16. Ils en déduisent que l’association plaignante ne saurait arguer d’un préjudice personnel, tel que requis par l’article 2 du code de procédure pénale, pour admettre, sur ce fondement de droit commun, la recevabilité de l’action civile.

17. En statuant ainsi, en l’absence d’agrément de l’association plaignante et dès lors que celle-ci n’était pas susceptible de subir un préjudice propre, directement causé par le délit de mise en danger d’autrui, la chambre de l’instruction n’a méconnu aucun des textes visés au moyen.

18. Ainsi le moyen doit être écarté.

19. Par ailleurs l’arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Président : M. Soulard
Rapporteur : Mme Ingall-Montagnier
Avocat général : M. Quintard
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié


Arrêt n°1502 du 8 septembre 2020 (19-85.004) – Cour de cassation – Chambre criminelle
-ECLI:FR:CCAS:2020:CR01502

ACTION CIVILE

Rejet

Sommaire
1°. L’article L.142-2 du code de l’environnement qui permet aux associations agréées pour la défense de l’environnement de se constituer partie civile, texte spécial d’interprétation stricte, ne s’applique qu’à la condition que l’infraction dénoncée relève de la liste limitative des infractions aux dispositions législatives relatives à la protection de l’environnement ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions ou les nuisances énumérées par cet article.
Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui retient qu’une association ne peut, sur le fondement de l’article L.142-2 du code de l’environnement qui a pour objet de protéger le cadre de vie, la nature et l’environnement, se constituer partie civile pour le délit de mise en danger d’autrui, qui s’attache à la protection des êtres humains (premier moyen).

2°. En application de l’article 2 du code de procédure pénale, l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction appartient uniquement à ceux qui ont personnellement souffert du dommage causé par l’infraction.
Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui retient qu’une association, personne morale, ne peut exciper d’une exposition à un risque d’atteinte à l’intégrité physique et n’est donc pas recevable à se constituer partie civile pour mise en danger d’autrui (second moyen).


Demandeur(s) : association Générations futures 


Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. L’association Générations futures a, le 13 janvier 2017, déposé auprès du procureur de la République une plainte simple du chef de mise en danger d’autrui, qui en substance visait les carences des pouvoirs publics dans les actions susceptibles d’être menées pour lutter contre l’exposition de la population aux polluants atmosphériques.

3. La plainte a été classée sans suite. L’association a alors déposé une plainte et s’est constituée partie civile devant le doyen des juges d’instruction.

4. Par ordonnance du 26 septembre 2017, le magistrat instructeur a rendu une ordonnance de refus d’informer pour irrecevabilité de la plainte avec constitution de partie civile, dont l’association a relevé appel.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de Générations futures, alors :

«  1°/ que les associations agréées peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives notamment à la protection de la nature et de l’environnement ou à l’amélioration du cadre de vie ; qu’il ressort des motifs de l’arrêt que la mise en danger est éventuellement une conséquence d’une atteinte à l’environnement ; qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de Générations futures du chef de délit de mise en danger d’autrui, que la mise en danger ne peut être assimilée à l’atteinte à l’environnement, lorsque ce délit implique, pour assurer la protection de la vie et de l’intégrité d’autrui, de veiller à ce qu’aucune atteinte ne soit portée à son cadre de vie, la chambre de l’instruction, qui n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a méconnu les articles L. 142-2 du code de l’environnement, 223-1 du code pénal, 85, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de Générations futures que le délit de mise en danger s’attache à la protection des êtres humains appelés à vivre dans le cadre de vie tandis que l’article L. 142-2 du code de l’environnement a pour objet de protéger le cadre de vie, autrement dit la nature et l’environnement, lorsque ce délit implique, pour assurer la protection de la vie et de l’intégrité d’autrui, de veiller à ce qu’aucune atteinte ne soit portée à son cadre de vie, la chambre de l’instruction a méconnu les textes susvisés. »

Réponse de la Cour

6. Pour confirmer l’ordonnance entreprise l’arrêt énonce que l’action civile devant les juridictions répressives est un droit exceptionnel qui en raison, de sa nature, doit être strictement renfermé dans les limites des articles 2 et 3 du code de procédure pénale et que l’article L.142-2 du code de l’environnement qui permet aux associations agréées pour la défense de l’environnement de se constituer partie civile, d’interprétation stricte s’agissant d’un texte spécial, ne s’applique qu’à la condition que l’infraction dénoncée relève de la liste limitative des infractions aux dispositions législatives relatives à la protection de l’environnement ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions ou les nuisances énumérées par cet article.

7. Les juges retiennent, par ailleurs, que la mise en danger d’autrui, qui est éventuellement une conséquence d’une atteinte à l’environnement, ne peut être assimilée à cette atteinte elle-même, que l’article L.142-2 du code de l’environnement a pour objet de protéger le cadre de vie, la nature et l’environnement, le délit de mise en danger s’attachant lui, au contraire, à la protection des êtres humains, appelés à vivre dans le-dit cadre ; qu’ainsi l’association ne peut se constituer partie civile sur le fondement de cet article pour le délit de mise en danger d’autrui.

8. Par ces énonciations, la chambre de l’instruction n’a méconnu aucun des textes spéciaux d’interprétation stricte visés au moyen.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de Générations futures, alors :

« 1°/ qu’en dehors de toute habilitation légale, une association est recevable à se constituer partie civile dès lors qu’elle est susceptible de subir un préjudice personnel directement causé par l’infraction ; qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l’association, que, par essence, une personne morale ne peut exciper une exposition au risque d’atteinte à l’intégrité physique, lorsque le délit de mise en danger d’autrui vise la protection de la vie ou de l’intégrité de toute personne sans distinction, de sorte que la mise en danger d’autrui, à la supposer établie, est susceptible de causer un danger à la vie de Générations futures, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 223-1 du code pénal, 2, 85, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ qu’une association est recevable, en tout état de cause, à se constituer partie civile dès lors que l’infraction est susceptible de porte atteinte aux intérêts collectifs qu’elle a conformément à son objet pour mission de défendre ; que Générations futures qui agit notamment pour la défense de la santé publique en relation avec les nuisances causées à l’environnement, est susceptible de subir un préjudice direct et personnel découlant du délit de mise en danger d’autrui ; qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de Générations futures du chef de délit de mise en danger d’autrui, que cette association ne pouvait se prévaloir d’un préjudice personnel lorsque ce délit, en ce qu’il vise la protection de la vie ou de l’intégrité d’autrui, est susceptible porte atteinte aux intérêts collectifs que l’association défend, la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. »

Réponse de la Cour

10. Pour confirmer l’ordonnance l’arrêt relève que l’action civile devant les juridictions répressives est un droit exceptionnel qui. en raison, de sa nature, doit être strictement renfermé dans les limites des articles 2 et 3 du code de procédure pénale, qu’en application de l’article 2 précité, l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction appartient uniquement à ceux qui ont personnellement souffert du dommage causé par l’infraction.

11. Les juges ajoutent que le délit de mise en danger d’autrui se définit comme le fait d’exposer autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement et que par essence, l’association, personne morale, ne peut exciper d’une telle exposition à ce risque d’atteinte à l’intégrité physique.

12. Ils en déduisent que la plaignante ne saurait arguer d’un préjudice personnel, requis par l’article 2 du code de procédure pénale, pour admettre, sur ce fondement de droit commun, la recevabilité de l’action civile.

13. En statuant ainsi, dès lors que l’association n’était pas susceptible de subir un préjudice personnel directement causé par le délit dénoncé de mise en danger d’autrui, la chambre de l’instruction n’a méconnu aucun des textes visés au moyen.

14. Ainsi, le moyen doit être écarté.

15. Par ailleurs l’arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;


Président : M. Soulard
Rapporteur : Mme Ingall-Montagnier
Avocat général : M. Quintard
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié