Quelle est la nature de la relation entre une communauté et un syndicat infra-communautaire bénéficiant d’une délégation pour l’eau ou l’assainissement ?

La loi de 2019 (loi n°2019-1461 du 27 décembre 2019) a ajouté un mécanisme supplémentaire d’assouplissement dans le cadre des transferts des compétences eau et assainissement collectif en permettant la délégation aux communes du service transféré mais aussi de conserver les syndicats infra-communautaires (intégralement dans le périmètre) en dérogeant au mécanisme de substitution (retirant la compétence et conduisant souvent à la dissolution du syndicat s’il n’a pas d’autre compétence) pour permettre finalement de le conserver sous réserve d’une délégation de compétence. La loi 3DS a assoupli encore le régime depuis.

Pour autant, et à la veille des prises de compétences par les communautés de communes (qui auront dans leur giron de manière obligatoire la compétence eau et assainissement au plus tard en 2026) et tandis que les communautés d’agglomération (qui héritèrent de la compétence 2020) se posent encore de nombreuses questions sur la nature de cette relation.

En effet de nombreuses questions restent en suspens sur cette relation contractuelle entre les communautés et les syndicats et notamment s’il est possible de déléguer à ces syndicats d’autres compétences connexes ou qui de la communauté ou du syndicat peut adopter des actes tels l’adoption des tarifs et d’autres interrogations juridico-pratiques.

Le Gouvernement a eu l’occasion d’expliciter la position des services de l’Etat dans une réponse à une question écrite parlementaire (JO Sénat 14/4/2022 p.1981) :

[…] La délégation laisse aux élus une latitude d’action dans la mesure où ils peuvent choisir librement sa durée et ses modalités d’exécution, au moyen d’une convention ad hoc. Cette marge de manœuvre ne saurait néanmoins permettre aux élus de contourner le principe du transfert obligatoire. Elle doit donc s’exercer conformément à la ligne de partage entre un transfert et une délégation de compétence, l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre demeurant responsable de la compétence comme le prévoient classiquement tous les mécanismes de délégation de compétence existants dans la loi, le délégataire exerçant au nom et pour le compte du délégant et lui rendant périodiquement compte de son activité. À la différence du transfert, l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) demeure ainsi le responsable de la compétence déléguée dans toutes les dimensions de son exercice, y compris pour en définir la politique tarifaire. Pour répondre aux besoins de clarification exprimés localement, ont été actualisées la fiche technique établie entre la direction générale des collectivités locales (DGCL) et la direction générale des finances publiques (DGFIP), relative aux modalités budgétaires et comptables de mise en oeuvre de la délégation de compétence, ainsi que la foire aux questions sur la mise en oeuvre de l’article 14 de la loi « Engagement et Proximité »consultables sur le portail internet »www.collectivites-locales.gouv.fr« . Des aménagements sur le volet budgétaire sont prévus, notamment la possibilité pour les syndicats infra-communautaires qui deviennent délégataires de ne pas clôturer leur budget annexe et la faculté pour la commune ou le syndicat de se voir confier par convention de mandat le recouvrement des redevances eau et/ou assainissement pour le compte et au nom de l’EPCI-FP. Il est rappelé aussi que si l’EPCI-FP, autorité délégante, décide in fine du prix de l’eau, les parties à la convention demeurent libres de négocier ce point et le délégataire de faire des propositions à l’EPCI-FP. […]

Question écrite n° 27416 de Mme Marie-Pierre Monier (Drôme – SER), publiée dans le JO Sénat du 24/03/2022 – page 1490, Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, publiée dans le JO Sénat du 14/04/2022 – page 1981

Cette prise de position est assez conforme en réalité aux positions déjà observées précédemment. Le transfert de compétence ne saurait être totalement neutralisé par la délégation de compétence. Reste néanmoins qu’on pourra alors être perplexes sur certains points. La portée majeure reste bien entendu de pouvoir maintenir les syndicats. En revanche sur l’outil contractuel et les marges de libertés rédactionnelles proposées, dans la mesure où le texte au final donne plus ou moins autant de latitude que dans une délégation de service … pourquoi le législateur a-t-il inventé un nouveau cadre juridique qui au final existait déjà via les articles L.5216-7-1 et L.5214-16-1 du CGCT (qui autorisent une communauté à déléguer la gestion d’un service ou équipement a un établissement public ou une commune). Ceci restera un mystère.