Plastiques à usage unique et marchés publics de l’Etat : des dérogations très limitées…

L’Etat s’était imposé un calendrier encore plus strict que celui imposé à d’autres acteurs en matière de fin des achats de plastiques à usage unique, sous réserve de dérogations à fixer par décret. Ledit décret est paru, avec des exceptions très limitées. 


Notre période est marquée par un verdissement accéléré de notre commande publique. Voir, pour un survol rapide (mais nous avons des dizaines d’articles dans notre blog dédiés à ce sujet…) :

Avec des règles spécifiques pour tel ou tel produits (pneus, flottes de véhicules, etc.).

Un type de produit a singulièrement à de nombreuses nouvelles règles : il s’agit du plastique. Ou, plus précisément, des plastiques. Là encore, parmi de multiples articles de notre blog, voici une brève synthèse récente :

Avec quelques grandes échéances ici schématisées :

Pour les plastiques à usage unique, le calendrier est le suivant, fixé par les dispositions du III du 2° de l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement, que voici : 

III. – Il est mis fin à la mise à disposition des produits en plastique à usage unique suivants :

1° A compter du 1er janvier 2020, pour les gobelets et verres ainsi que les assiettes jetables de cuisine pour la table ;

2° A compter du 1er janvier 2021, pour les pailles à l’exception de celles destinées à être utilisées à des fins médicales, confettis en plastique, piques à steak, couvercles à verre jetables, assiettes autres que celles mentionnées au 1° du présent III y compris celles comportant un film plastique, couverts, bâtonnets mélangeurs pour boissons, contenants ou récipients en polystyrène expansé destinés à la consommation sur place ou nomade, bouteilles en polystyrène expansé pour boissons ainsi que les tiges de support pour ballons et leurs mécanismes, à l’exception des tiges et mécanismes destinés aux usages et applications industriels ou professionnels et non destinés à être distribués aux consommateurs.

A compter du 1er janvier 2020, la mise sur le marché des bâtonnets ouatés à usage domestique dont la tige est en plastique est interdite. Cette interdiction ne s’applique pas aux dispositifs définis aux articles L. 5211-1 et L. 5221-1 du code de la santé publique.

Les vendeurs de boissons à emporter adoptent une tarification plus basse lorsque la boisson est vendue dans un récipient réemployable présenté par le consommateur par rapport au prix demandé lorsque la boisson est servie dans un gobelet jetable.

Au plus tard le 1er janvier 2025, il est mis fin a ̀ l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique dans les services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires ainsi que des établissements d’accueil des enfants de moins de six ans. Dans les collectivités territoriales de moins de 2 000 habitants, le présent alinéa est applicable au plus tard le 1er janvier 2028.

Au plus tard le 1er janvier 2020, il est mis fin à l’utilisation de bouteilles d’eau plate en plastique dans le cadre des services de restauration collective scolaire. Le présent alinéa n’est pas applicable aux services situés sur des territoires non desservis par un réseau d’eau potable ou lorsqu’une restriction de l’eau destinée à la consommation humaine pour les usages alimentaires est prononcée par le représentant de l’Etat dans le département.

A compter du 1er janvier 2022, l’Etat n’achète plus de plastique à usage unique en vue d’une utilisation sur les lieux de travail et dans les évènements qu’il organise. Un décret précise les situations dans lesquelles cette interdiction ne s’applique pas, notamment afin de prévenir les risques pour la santé ou pour la sécurité.

Les modalités d’application du présent III sont fixées par décret, notamment la teneur biosourcée minimale des gobelets, verres et assiettes et les conditions dans lesquelles cette teneur est progressivement augmentée.

La production, la distribution, la vente, la mise à disposition et l’utilisation d’emballages ou de sacs fabriqués, en tout ou partie, à partir de plastique oxodégradable sont interdites.

A compter du 1er janvier 2021, la mise sur le marché des produits fabriqués à base de plastique oxodégradable est interdite.

A compter du 1er janvier 2021, il est mis fin à la distribution gratuite de bouteilles en plastique contenant des boissons dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel. Cette disposition ne s’applique pas aux établissements non desservis par un réseau d’eau potable, à la distribution gratuite de bouteilles en plastique lorsqu’elle répond à un impératif de santé publique, ou lorsqu’une restriction de l’eau destinée à la consommation humaine pour les usages alimentaires est prononcée par l’autorité administrative compétente.

A compter du 1er janvier 2021, les clauses contractuelles imposant la fourniture ou l’utilisation de bouteilles en plastique à usage unique dans le cadre d’évènements festifs, culturels ou sportifs sont réputées non écrites, à l’exception des cas où la substitution de ces bouteilles par des produits réutilisables est impossible.

A compter du 1er janvier 2022, les établissements recevant du public sont tenus d’être équipés d’au moins une fontaine d’eau potable accessible au public, lorsque cette installation est réalisable dans des conditions raisonnables. Cette fontaine est raccordée au réseau d’eau potable lorsque l’établissement est raccordé à un réseau d’eau potable. Un décret précise les catégories d’établissements soumis à cette obligation et les modalités d’application du présent alinéa.

Les établissements de restauration et débits de boisson sont tenus d’indiquer de manière visible sur leur carte ou sur un espace d’affichage la possibilité pour les consommateurs de demander de l’eau potable gratuite. Ces établissements doivent donner accès à leurs clients à une eau potable fraîche ou tempérée, correspondant à un usage de boisson.

A compter du 1er janvier 2022, tout commerce de détail exposant à la vente des fruits et légumes frais non transformés est tenu de les exposer sans conditionnement composé pour tout ou partie de matière plastique. Cette obligation n’est pas applicable aux fruits et légumes conditionnés par lots de 1,5 kilogramme ou plus ainsi qu’aux fruits et légumes présentant un risque de détérioration lors de leur vente en vrac dont la liste est fixée par décret.

A compter du 1er janvier 2022, la mise sur le marché de sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable au sens du 16 de l’article 3 de la directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement est interdite. Les modalités d’application de cette interdiction sont définies par décret en Conseil d’Etat.

A compter du 1er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés dans l’enceinte de l’établissement dans des gobelets, y compris leurs moyens de fermeture et couvercles, des assiettes et des récipients réemployables ainsi qu’avec des couverts réemployables. Les modalités de mise en œuvre du présent alinéa sont précisées par décret.

A compter du 1er janvier 2022, les gobelets, les couverts, les assiettes et les récipients utilisés dans le cadre d’un service de portage quotidien de repas à domicile sont réemployables et font l’objet d’une collecte. Les modalités de mise en œuvre du présent alinéa ainsi que les exceptions motivées pour des raisons de protection de la santé publique sont précisées par décret.

Au plus tard le 1er janvier 2025, il est mis fin à l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de service en plastique, dans les services de pédiatrie, d’obstétrique et de maternité, les centres périnataux de proximité ainsi que les services mentionnés au chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique. Cette interdiction peut faire l’objet d’une dérogation dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat.

A compter du 1er janvier 2025, les emballages constitués pour tout ou partie de polymères ou de copolymères styréniques, non recyclables et dans l’incapacité d’intégrer une filière de recyclage, sont interdits.

A compter du 1er janvier 2025, les services de restauration collective proposant des services de vente à emporter proposent au consommateur d’être servi dans un contenant réutilisable ou composé de matières recyclables. »

Ceux qui ne se sont pas perdus en route à la lecture, laborieuse, de ce texte, auront noté que l’Etat s’impose un calendrier un peu accéléré mais avec des dérogations :

« A compter du 1er janvier 2022, l’Etat n’achète plus de plastique à usage unique en vue d’une utilisation sur les lieux de travail et dans les évènements qu’il organise. Un décret précise les situations dans lesquelles cette interdiction ne s’applique pas, notamment afin de prévenir les risques pour la santé ou pour la sécurité.»

Lesdites dérogations réglementaires ont été fixées au JO, et ce avec la publication du décret n° 2022-2 du 4 janvier 2022 relatif aux situations permettant de déroger à l’interdiction d’acquisition par l’Etat de produits en plastique à usage unique (NOR : TRED2129475D) 

Ce décret commence par rappeler l’interdiction posée par la loi avec entrée en vigueur depuis le 1er janvier dernier de toute manière, avec définition du plastique à usage unique (ce que la loi n’avait pas vraiment fait si ce n’est pas ce long inventaire) :

« Interdiction est faite aux services centraux et déconcentrés de l’Etat d’acheter ou de se fournir en produits en plastique à usage unique, en vue d’une utilisation sur les lieux de travail, y compris les lieux d’intervention, et dans les évènements qu’ils organisent.
« Pour l’application du présent texte, on entend par « produit en plastique à usage unique », tout produit fabriqué entièrement ou partiellement à partir de plastique et qui n’est pas conçu, créé ou mis sur le marché pour accomplir, pendant sa durée de vie, plusieurs trajets ou rotations en étant retourné à un producteur pour être rempli à nouveau ou réutilisé pour un usage identique à celui pour lequel il a été conçu.»

Et surtout, donc, ce décret fixe, de manière peu étendue en fait, les dérogations à cette interdiction :


« – la gestion d’une crise humanitaire, sanitaire, environnementale ou technologique ;
« – l’application de règles de sécurité impliquant l’utilisation d’équipements de protection individuelle (EPI) ;
« – les situations nécessitant de constituer des stocks de précaution ou de recourir à des denrées et rations alimentaires dont le conditionnement répond à des exigences en matières de durée de vie et de protection des qualités sanitaires et organoleptiques de l’alimentation ;
« – les missions opérationnelles et d’entraînement à des fins de défense et sécurité, et notamment, leur préparation, leur soutien, leur exécution et l’équipement des forces armées ;
« – les missions de dépollution ou de décontamination de sols ou de gestion de l’exposition à des substances dangereuses ;
« – les missions de préparation, de contrôle, de prélèvements et d’analyse en laboratoire, effectuées notamment par les corps de métiers relevant de missions de contrôle et d’inspection ;
« – les interventions de secours et l’ensemble des missions relevant de la protection de la santé ;
« – les activités de conservation, de restauration et d’analyse du fond patrimonial culturel.»

Les dispositions de ce décret donneront lieu à évaluation et elles s’appliquent aux marchés publics de fournitures et de services pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel à la concurrence a été envoyé à la publication à compter de son entrée en vigueur.