Assainissement collecte et vente immobilière : un arrêt important, mais à ne pas sur-interpréter

Bravo à M. Marc LAIME (voir ici) qui a trouvé un arrêt intéressant rendu récemment par la Cour de cassation. 

Une maison est bien raccordée à l’assainissement collectif, mais via le débordement d’une fosse septique peu ou pas accessible. Les effluents finissent bien dans les réseaux collectifs, donc. 

OUI mais, précise la Cour « celui qui vend un immeuble raccordé au réseau public d’assainissement s’engage à vendre un bien dont tous les écoulements sont raccordés » et que si l’acte de vente stipule « qu’il existe un réseau public d’assainissement et que l’immeuble vendu y est raccordé […] », cela signifie que « que les vendeurs s’étaient engagés à délivrer un bien dont toutes les évacuations étaient directement raccordées au réseau public d’assainissement, ce qui excluait la présence d’une fosse septique servant de bac tampon recueillant les eaux usées et dans lesquelles celles-ci, tant qu’elles ne débordaient pas, étaient destinées à stagner ».

D’ailleurs, on rappellera qu’aux termes de l’article L. 1331-5 du Code de la santé publique, « dès l’établissement du branchement, les fosses et autres installations de même nature sont mises hors d’état de servir ou de créer des nuisances à venir, par les soins et aux frais du propriétaire.»

Attention : nous sommes ici donc sur la conformité de ce qui est vendu avec les mentions de l’acte de vente (ou des promesses de vente, synallagmatiques ou non). 

Ceci n’est donc pas à confondre avec :

  • les règles de raccordement à l’assainissement collectif (art. L. 1331-1 et suivants du Code la Santé Publique). 
  • les règles de mise en conformité aux règles de SPANC en cas de vente immobilière d’une habitation qui ne serait pas dotée d’une installation d’assainissement NON collectif aux normes (voir entre autres à ce sujet les dispositions de l’article L. 1331-11-1 du Code de la santé publique)

Qu’un raccordement via le débordement d’une fosse septique soit, ou non, conforme aux règles par ailleurs est un autre sujet et, si les actes relatifs à la vente avaient été clairs sur cette situation, il probable, mais pas certain, que la vente eût été nulle ou que les vendeurs eussent été conduits à prendre à leur charge la mise aux normes des parties privatives (installations intérieures) de leur assainissement collectif. 

Pourquoi « probable mais pas certain » ?

Parce que la Cour de cassation, dans cet arrêt, a des formulations qui glissent vers l’obligation d’être en assainissement collectif direct, sans passer par une vieille fosse septique :

  • « le vendeur étant tenu de délivrer une chose conforme aux spécifications convenues, celui qui vend un immeuble raccordé au réseau public d’assainissement s’engage à vendre un bien dont tous les écoulements sont raccordés ». 
  • « l’acte de vente mentionnait que l’immeuble était raccordé au réseau public d’assainissement, ce dont il résultait que les vendeurs s’étaient engagés à délivrer un bien dont toutes les canalisations y étaient raccordées » 

DONC :

  • si l’acte de vente stipule qu’il y a raccordement à l’assainissement collectif, celui-ci doit être conforme et direct 
  • si l’acte de vente mentionne très précisément (ce qui là n’était le cas que via des pièces annexes) la situation non conforme de raccordement à l’assainissement collectif, il est possible que cet arrêt rende la vente fragile en droit mais ce point reste, encore, en l’état des formulations de cet arrêt, encore incertain selon nous (voir par exemple : Cour de cassation, Chambre civile 3, 11 juin 2013, 12-20.183 ; Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 octobre 2015, 13-28.824)

Dans le même sens, on notera qu’une clause dans un acte de vente visant à exclure la garantie décennale pour cause de non ou de mauvais raccordement à l’assainissement collectif est réputée non écrite (Cour de cassation, Chambre civile 3, 19 mars 2020, 18-22.983)

Source : Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 27 mai 2021, 19-25.991