Déverouillage des requêtes collectives en fiscal (TEOM en l’espèce), au prix d’une petite liberté face à la formulation des textes…

Le Conseil d’Etat déverrouille partiellement les requêtes collectives en droit fiscal (dans une affaire de TEOM en l’espèce), l’unification jurisprudentielle et la simplification opérationnelle valant bien, selon la Haute Assemblée, une nouvelle fois, que l’on statue à l’encontre même de la formulation des textes. Comme dans diverses affaires de ces dernières années, à commencer par la jurisprudence Czabaj, l’interprétation contra legem fait de moins en moins peur au juge administratif… 

L’article R. 197-1 du livre des procédures fiscales (LPF) impose que toute réclamation préalable soit individuelle, sous réserve de quelques exceptions…. mais toute irrecevabilité sur ce point ne peut être soulevée par l’administration fiscale que si celle-ci avait demandé aux contribuables de régulariser leur réclamation (CE, 11 octobre 1978, n° 08078).

Mais ensuite, au stade du recours contentieux lui-même, le juge administratif restait assez fermé aux requêtes collectives (en cas de lien suffisant entre elles, pour schématiser) :

C’est chose faite maintenant avec un arrêt du 1er avril du Conseil d’Etat dont le résumé aux futures tables du rec. (résumé de la base Ariane à ce jour) est clair et conduit à unifier la jurisprudence au risque de s’écarter un peu du droit écrit (tendance lourde de ces dernières années, que l’on pense à l’arrêt Czabaj contra legem…) :

« Le premier alinéa de l’article R*. 197-1 du livre des procédures fiscales (LPF), applicable à la procédure de réclamation préalable devant l’administration fiscale, ne fait pas obstacle à la recevabilité d’une requête émanant de plusieurs requérants devant le juge de l’impôt. 2) Une telle requête collective n’est toutefois recevable que si les conclusions qu’elle comporte présentent entre elles un lien suffisant.»

En pratique, pour les requérants comme pour le juge, c’est plus satisfaisant.

Mais une nouvelle fois, au lieu de faire remonter au Gouvernement l’utilité de réformer telle ou telle norme réglementaire, ce que le Conseil d’Etat sait très bien faire quand bon lui semble, le juge administratif, sans même plus faire semblant de dégager un principe général du droit ou autre fiction de raisonnement, désormais, se contente de faire prévaloir des interprétation d’un texte tout simplement contre les formulations mêmes desdits textes. C’est plus simple. Le droit en est moins prévisible. Le juge s’affranchit plus de ce que sont les prérogatives des pouvoirs exécutifs et législatifs. Mais pourquoi s’embêter avec de telles broutilles ? 

Autres exemples récents d’interprétations contra legem pour les juridictions du Palais Royal :

Comme dans diverses affaires de ces dernières années, à commencer par la jurisprudence Czabaj, l’interprétation contra legem fait de moins en moins peur au juge administratif… 

Source : Conseil d’État, 1er avril 2022, n° 450320, à mentionner aux tables du recueil Lebon

Voir ici les conclusions de Mme Céline GUIBE, Rapporteure publique